La loi Duplomb, portée par le sénateur LR Laurent Duplomb, entend « alléger les contraintes » pour les agriculteurs, mais suscite une vive controverse : réintroduction de néonicotinoïdes interdits, réduction du rôle des agences sanitaires, facilitation d'infrastructures hydrauliques intensives… Pour beaucoup, c’est un dangereux recul en matière de santé publique et de biodiversité. Retour sur les enjeux, les chiffres et les mobilisations à venir.
Le texte est né en novembre 2024, dans un contexte où le monde agricole se heurte à des contraintes jugées administratives. Il propose de réautoriser par dérogation deux néonicotinoïdes – l’acétamipride et le flupyradifurone – pourtant interdits depuis 2018 en raison de leur toxicité pour les abeilles. Depuis que les premières restrictions ont été mises en place, près de 12 500 points de captage d’eau potable ont été fermés depuis 1980, preuve de la contamination chronique des nappes.
La Ligue contre le cancer, appuyée par plus de 1 000 médecins et chercheurs, tire la sonnette d’alarme : ces produits sont potentiellement cancérogènes. L’Anses – Agence nationale de sécurité sanitaire – serait contournée par un nouveau conseil à la légitimité incertaine, jugé trop proche des intérêts agricoles et sans garanties d’indépendance. Le directeur général d’Anses a même menacé de démissionner si la loi était adoptée.
Sur la santé humaine, les chiffres sont déjà accablants : les agriculteurs sont jusqu’à deux fois plus exposés aux lymphomes non hodgkiniens et au cancer de la prostate, et le risque de maladie de Parkinson est en hausse. Ces pathologies sont fortement corrélées à l’exposition aux pesticides. Du côté de l’environnement, un quart des sols arables sont dégradés, 70 % de la perte de biodiversité terrestre mondiale est liée à l’agriculture, et 25 % des nappes phréatiques sont contaminées. On estime que près de 75 % des fruits et 50 % des légumes non bio contiennent des résidus de pesticides entre 2017 et 2021.
Les ONG dénoncent également la facilitation des méga‑bassines et la réduction du pouvoir des agences comme l’OFB ou l’Anses, au profit d’une agriculture intensive. Cela menace non seulement les zones humides, mais aussi les pollinisateurs, essentiels à la sécurité alimentaire. En réaction, des syndicats comme la Confédération paysanne et Alsace Nature, appuyés par Greenpeace, la LPO et Générations Futures, ont appelé à plusieurs mouvements.
Le 27 mai, plus d’un millier de messages citoyens avaient déjà été envoyés, et des rassemblements lourds autour de l’Assemblée nationale, qualifiés de « 49.3 agro‑industriel » par des militants. Plus récemment, le weekend des 21 et 28 juin, des actions symboliques ont fleuri à Saint‑Junien, Besançon, Pau, Poitiers, Lyon et Die pour semer des fleurs sur les ronds‑points, symbolisant une agriculture bio et respectueuse du vivant.
Les prochains rassemblements sont programmés pour le dimanche 29 juin 2025 : à Paris (Invalides, esplanade des Invalides) à 14 h ; à Poitiers à 11 h devant la préfecture ; à Lyon à 10 h ; à Die à 10 h place de la Comtesse. D’autres territoires comme Strasbourg (9 h 30 place de la République à Neustadt) et Colmar (11 h devant la préfecture du Haut‑Rhin) participent également à l’élan national.
Face à ce qu’ils nomment une « loi toxique » et un « hold‑up démocratique », les opposants appellent chacun à venir seul·e, en famille ou entre ami·e·s, pour défendre une agriculture respectueuse du vivant, fondée sur la science, la santé publique et la préservation durable de nos ressources.
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